Il y a 150 ans,

Le Massérac nouveau est arrivé

C’est en effet entre 1860 et 1880 que le visage actuel de Massérac se dessine. Les nouvelles voies du Seigneur et du chemin de fer bouleversent les habitudes des habitants qui ne prieront plus et ne voyageront plus comme au début du XIX e siècle. Trois édifices témoignent de ce temps d’après…

Le plus imposant est l’église qui fut bénie en grande pompe le 24 juin 1872. Oeuvre dirigée par l’abbé Goulet nommé à Massérac en 1860, elle remplace l’ancienne chapelle, devenue trop petite, édifiée au début du Moyen âge près du cimetière actuel.Celle-ci ne pouvait contenir que 350 personnes environ à une époque où plus du double d’habitants allait assidûment à la messe.

Dix ans d'efforts

Pour réaliser ce grand projet initié dès 1861, il fallut vendre des biens communaux, trouver un terrain, faire approuver un plan d’architecte nantais, ouvrir une carrière de pierres à La Bessière où presque tous les Masséracéens travailleront bénévolement, rechercher d’autres financements,… Malgré de nombreuses difficultés, sa première pierre sera posée à l’été 1869, et sa dernière en 1871 après beaucoup de retard pris pendant la guerre de 1870.

Photo sur plaque de verre datant de 1920 (Archives de Nantes).

Ne restait plus alors qu’à y mettre dallage, portes et fenêtres qui seront ornées de vitraux (offerts par des donateurs), et à l’équiper du mobilier adéquat. Il fallut finalement attendre le 24 juin 1872 pour qu’elle soit bénie fastueusement par l’évêque de Nantes.

Nous raconterons en détail cette fabuleuse journée dans un autre article, avant juin 2022 qui marquera les 150 ans de l’église.

L'oratoire Saint Benoît

Moins grandiose, quoiqu’imposant aussi dans son genre, l’oratoire du Bas-Paimbu fut quant à lui béni plus d’une décennie avant, en1859. Oeuvre de l’abbé Louvel sanctuarisant les rochers d’où prêchait le moine venu de Grèce, la « Chaire de Saint Benoît » demanda deux ans de travaux.

Selon les notes de l’abbé Goulet, « Sa Grandeur Monseigneur Jaquemet, évêque de Nantes (accompagné de nombreuses autres autorités religieuses) vint bénir solennellement le nouveau monument le dimanche 4 septembre 1859 ». « Une longue procession, formée de fidèles rangés sur deux lignes, s’est déroulée sur les chemins qui conduisent du bourg aux rives de la Vilaine. Les reliques de Saint Benoît et de Sainte Avenie ont été triomphalement portées par les prêtres et un nombreux clergé, rangé autour du Pontife, les accompagnait en chantant les Litanies*… ». 

Sur des anciennes photos , on constate que ce monument a un peu changé depuis ce jour. La chaire, simple rambarde métallique, aujourd’hui au bas des rochers, se situait initialement aux pieds de la statue de Benoît. L’ensemble était aussi fermé par des portes en bois. Et entouré de peu de végétation: c’est une véritable forêt qui cerne maintenant l’édifice.

Pour la petite histoire, ajoutons que la terrible tempête d’octobre 1860 renversa rapidement la grande croix de granit élevée derrière la statue du moine ! Elle fut remplacée à l’identique et à nouveau bénie en mai 1861 par l’abbé Goulet.

L'oratoire il y a cent ans environ, fermé par des portes en bois.
L'oratoire en 2020: piliers et portes d'entrée ont disparu, une "forêt" cerne le monument. (photo D.Lérault)

Le train a Massérac

Centenaire de la ligne Rennes-Redon. Les locomotives d'époque.

Troisième grand événement de l’époque, le train arrive peu après. Du moins passe-t-il seulement dans Massérac dès 1862 car la gare ne sera construite qu’en 1881. Les années précédentes, on allait le prendre à Beslé, pour aller à Rennes ou à Redon, en locomotive à vapeur évidemment.

Les trains ne s’arrêtèrent en bas de la nouvelle église qu’après la création de la ligne dite de Châteaubriand qui rejoignait au Plessis celle de Rennes à Redon et qui passait par Coismo où une autre gare fut bâtie. Rapidement hélas, cette voie de la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest fut fermée au trafic voyageurs dès 1939 puis déclassée en 1954. Il n’en reste aujourd’hui, rails enlevés, qu’une jolie voie verte.

Ainsi, en une vingtaine d’années, le visage de la commune et sa vie quotidienne ont-ils été bouleversés. D’autres importants événements modifieront encore le village, comme l’installation de l’eau courante et de l’électricité au XXe siècle. Mais c’est bien il y a un siècle et demi environ que le Massérac nouveau est arrivé, un bon millésime que nous goûtons encore aujourd’hui.

Gare de Coismo: à gauche, Hyppolite DUBREIL, grand-père de Raymond DAVID des Goisbeaux
Au début du XXe siècle à Lusanger: la même image aurait pu être faite à Massérac, où notamment la gare est identique, un standard de l'époque.
La gare de Massérac, probablement entre deux guerres. Le hangar à marchandises au fond à gauche a disparu depuis.

Dominique Lérault / dominiquelerault@free.fr

* Récits extraits du journal hebdomadaire local « Le Petit Saint Benoît » que publia l’abbé Griveau (curé de Massérac de 1902 à 1919) entre Mai 1907 et Décembre 1912 qui reprend les notes d’époque de l’abbé Goulet, curé du village de 1860 à 1889. Ces deux abbés sont enterrés dans l’ancienne église comme l’indiquent des plaques commémoratives.